Comment pouvons-nous aider
nos élèves à découvrir le rôle de leur génération dans la compréhension des
traités au Canada dans leur langue seconde ? Cette question est au cœur d’une réflexion qui a inspiré
Leia et Naomi, toutes les deux enseignantes dans le programme d’immersion
française à l’école secondaire Campbell Collegiate, à se lancer dans l’aventure de Treaty4Project.
Depuis plusieurs années,
nos élèves étudient l’histoire et la vision du monde des Premières nations au
Canada. À la suite de nombreuses
activités d’apprentissage, nous avons remarqué que même si les élèves avaient
travaillé selon les attentes du programme d’étude, leur compréhension des
traités demeurait superficielle et leur vision de l’histoire canadienne était
principalement selon un point de vue européen. Dans un tel contexte, que pouvions nous faire pour permettre
à nos élèves de vivre une expérience d'apprentissage authentique dans leur
langue seconde ?
En immersion française, le
défi est double puisque l’élève doit à la fois apprendre une nouvelle langue et acquérir
une compréhension suffisante des concepts enseignés tels qu’ils sont prévus
dans le programme d’études du ministère de l’éducation.[1]
La compréhension des traités étant intimement
liée à la reproduction d’un discours qui encourage la promotion d’une
discrimination raciale selon une vision systémique, il nous est apparu
essentiel d’aborder la question de l’octroi inégal des privilèges sociaux.[2]
Devant le double
défi, celui de l’apprentissage de la langue française ainsi que la complexité
relié à la compréhension des traités en Saskatchewan, nous nous sommes interrogées
sur la possibilité d’aborder l’étude de ce sujet de façon différente. Sachant que la langue est le véhicule qui
favorise la compréhension des idées et qu’une difficulté au niveau de la
compréhension du contenu peut devenir une entrave à l’apprentissage de la
langue, il nous est apparu essentiel d’enseigner au sujet des traités selon une
perspective multidisciplinaire.
À travers l’enseignement
de la langue française des arts visuels et des sciences sociales nous avions à
la fois le désir d’intégrer l’enseignement des traités dans le cadre de notre quotidien
et d’encourager
le développement langagier de nos élèves.
Dans cet optique, il nous est apparu tout à fait naturel qu’une
collaboration s’établisse entre nos différents groupes et matières académiques.
Afin de favoriser une
réflexion en profondeur au sujet des traités, nous avons trouvé pertinent
d’organiser une conférence jeunesse, Treaty
4: The next generation project.
En prenant en considération la réalité vécue dans notre province
(Saskatchewan), l’objectif principal de ce projet éducatif est d’amener nos
élèves à explorer l’idée d’une appartenance actuelle au Traité no
4. Pour ce faire, le premier jour
de la conférence (28 avril), les élèves auront la possibilité de participer à 4
ateliers sur une sélection de 12 sur des thèmes variés au sujet de l'idée de la
citoyenneté lorsqu’on appartient au Traité no 4 et de réfléchir à
l’avenir. À la suite de leur apprentissage,
lors de la 2e journée (29 avril) les élèves auront l’opportunité de
travailler avec l'artiste Ray Keighley sur la création d’une œuvre d'art
collaborative afin de représenter leur vision idéale de l’avenir.
Sachant que l’esprit
initial des traités appelle à la collaboration des individus qui vivent sur un
même territoire il était important pour nous que nos élèves puissent vivre
l’expérience concrète d’établir des contacts avec les élèves des écoles secondaires
environnantes appartenant à la même commission scolaire. Considérant que le français est une
langue vécue dans un contexte minoritaire en Saskatchewan nous avons rapidement
pris conscience de l’importance d’ajouter à ce projet éducatif un caractère bilingue.
La majorité des personnes ressources au sujet de la culture Première nations
(ainés, artistes, auteurs, présentateurs, chercheurs) et les écoles
environnantes s’expriment souvent eux aussi en deux langues soit le cri et
l’anglais. Malgré ces questions de
langues et d’identités, l’anglais fut le choix pour tisser ces liens d’amitié
et de collaboration. Une invitation fut lancée aux enseignants de notre
commission scolaire et une collaboration fut établit entre les écoles secondaire de Scott, Martin et
Balfour.
Afin que
la conférence jeunesse puisse atteindre son plein potentiel, il nous est apparu
essentiel d’intégrer dans notre planification scolaire les
thèmes abordés et un projet éducatif de réflexion afin de permettre aux élèves
d’approfondir en français leurs connaissances à ce sujet. Les élèves de la 9e
et de la 12e année inscrit dans le programme d’immersion française
de l’école secondaire Campbell abordent présentement ces thèmes dans leurs
cours de Français Arts langagiers 9, Sciences humaines 9, Français Arts
langagiers 30 et Sciences sociales 30 par l’entremise de projets, d’expériences en lecture avec l’études de romans (Moi,
Sitting Bull, Michel Piquemal, Jeanne,
Fille du Roy, Suzanne Martel) des enseignements magistraux, des invités
spéciaux, de la recherche indépendante et toutes autres activités liées
directement au programme d’étude de ces quatre sujets académiques. Dans
le cadre de ces cours, ont approfondis les thèmes suivants :
- Les moyens de subsistance (chasse, cueillette) des peuples Cris et Nakotas
- Les mythes et les légendes
- Les traditions pratiquées aujourd'hui et leur importance pour la culture autochtone
- Un regard historique sur la mise en place du Traité no 4 au 19e siècle
· La question
identitaire entre les différents peuples qui vivent sur le territoire de la
Saskatchewan au 19e siècle (Les Cris, les Nakotas, Les Britanniques,
les Canadien-français)
La
compréhension de ces thèmes a permis à nos élèves de commencer une réflexion en
français sur les questions suivantes:
a) Qu'est-ce que cela signifie pour les gens habitant en Saskatchewan
«d’appartenir » au Traité no 4 ?
b) Comment la compréhension du Traité no 4 a présentement un impact sur ma vie
personnelle ?
c) Comment la création d’une pièce d’art visuelle peut m’aider à comprendre la
complexité des concepts présents dans le Traité no 4 ?
Après
la conférence, les deux groupes d’élèves (9e & 12e
années) auront à réaliser un travail qui démontre leur compréhension des connaissances
acquises lors de la conférence.
Par le biais de cette activité de réinvestissement, nous espérons
évoquer chez nos élèves un intérêt pour les questions reliées à la justice
sociale ainsi qu’une conscientisation sur la question du Traité no4
dans leur vie personnelle.
En
langue française, les élèves de la 9e année auront à réaliser un
album illustré au sujet de l’histoire du Traité no 4 et ce que nous
devons faire pour encourager une citoyenneté engagée envers le Traité no
4. Ce travail est lié aux attentes
du programme d’études de Français 9 et sera aussi inséré dans l’évaluation du
cours de Sciences humaines 9.
De
leur côté, les élèves de 12e année seront
appelés à répondre à une question
de recherche connectée à la question des traités en Saskatchewan par un
processus d'enquête. Grâce à cette expérience pratique, nous espérons que les étudiants
seront en mesure de formuler une réflexion authentique et de faire des liens
significatifs entre leurs recherches personnelles sur la réalité vécue
actuellement sur le territoire du Traité no 4 et l’expérience vécue
dans le cadre de Treaty4Project. Ce projet de recherche a pour but de
permettre à l’élève de présenter une argumentation approfondie sur la question
des traités en Saskatchewan et représentera une partie importante de
l’évaluation finale des cours de Français 30 et Sciences sociales 30.
Treaty4Project s’inscrit dans le développement de stratégies
pédagogiques qui permettent aux élèves en immersion française de développer une
meilleure compréhension des enjeux reliés aux sciences sociales tout en
favorisant l’apprentissage d’une langue seconde. Cette vision encourage les élèves d’immersion française à
persévérer dans leur apprentissage et à surmonter les difficultés rencontrées
lorsqu’ils doivent étudier en profondeur des sujets aussi complexe que la
discrimination et le racisme. En sommes, notre espoir est
que les activités réalisées en classe dans le cadre de Treaty4Project
permettent à nos élèves de la 9e et de la 12e année de vivre l’expérience
d’étudier au sujet des traités de façon plus authentique en explorant des
points de vue plus inclusifs par rapport à l’histoire de la Saskatchewan.
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